Par un amendement de sa majorité, le gvt persiste dans son travail de sape de la réforme de l’AAH pour vider le sens de la déconjugalisation. Cette allocation n’est ni un minima social ni un revenu de remplacement de nature assurantielle mais un revenu individuel d’existence.
Il y a sept mois, nous débattions déjà de cette proposition de loi. Nous nous réjouissions de l’adoption – enfin ! après des années de mobilisations de la société civile et des associations – d’une étape historique pour l’autonomie et la dignité des personnes en situation de grave handicap.
Tout a été dit de cet impératif et rappelé par la Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme, la Défenseure des droits et cet été le Comité des droits des personnes handicapées des Nations-Unies statuant sur l’application par la France de la Convention internationale relative aux droits des personnes handicapées.
Tout a été dit, mais le gouvernement persiste et a entrepris un minutieux travail de sape lors de la navette parlementaire jusqu’à vider le texte de son sens à l’Assemblée nationale en remplaçant la déconjugalisation par un abattement forfaitaire sur les revenus du conjoint, privant ainsi la loi de sa portée émancipatrice, semblant ainsi concéder quelques dépenses supplémentaires dans une sorte de compromis financier.
Mais une telle obstination, une telle rigidité au risque de l’impopularité, a forcément des motivations profondes. De quoi ce refus de la déconjugalisation est-il le nom ? Ce débat fait suite à ce qu’a dû consentir le Président de la République lors des travaux préparatoires au Revenu Universel d’Existence, en admettant que l’AAH n’est pas un minima social et ne devra donc pas être fusionné avec ceux-ci dans son projet. Concession dont il veille désormais à ce qu’on en tire pas tous les enseignements.
En effet, ce qui insiste, c’est la résistance idéologique à reconnaître qu’une personne qui ne peut pas ou peu travailler, ou que le marché de l’emploi ne permet pas d’inclure en regard de ses exigences de rentabilité et de son organisation, et ceci de façon durable voire définitive, a droit, attaché à sa personne, à un revenu individuel d’existence, des ressources propres et pérennes lui assurant sécurité, autonomie, dignité, droit d’existence citoyenne que ne peut garantir que l’Etat.
Droit d’existence inhérent à cette situation particulière déconnectée durablement de la conditionnalité de travailler ou de fournir des efforts d’insertion, voilà qui heurte profondément le projet gouvernemental de refonte de tous les droits à la seule aune de l’activité.
L’AAH n’est pas plus un revenu de remplacement de nature assurantielle.
Elle est donc par nature un revenu d’existence donc forcément individuel, propre à la personne en situation de handicap quels que soient ses choix de vie, la garantie de ce droit ne doit pas être reporté sur le partenaire en générant une dépendance et une asymétrie délétère dans le couple. L’adulte en situation de handicap ne dépend pas de la solidarité de ses parents et ne doit pas plus dépendre de celle de l’adulte avec qui il vit.
Une fois encore, les personnes en situation d’handicap posent des questions dont la réponse interroge la façon dont nous faisons société. Même en incapacité partielle ou totale de travailler, la personne en situation grave de handicap doit se voir reconnaître le droit d’exister et de disposer de ressources propres pour son indépendance.