Après l’abandon du projet de loi Autonomie, vanté 5 ans durant comme le chantier social du quinquennat, le projet de loi de Protection des enfants aurait pu être l’occasion pour le gouvernement de présenter un texte ambitieux sur le champ de l’enfance, marquant une nouvelle avancée après les grandes lois de 2007 et 2016.
Ambitieux également dans les moyens dégagés, pour permettre enfin l’effectivité de ces lois, et répondre à l’attente des acteurs et aux besoins et intérêts supérieurs de l’enfant.
Les constats sont connus : inégalités criantes en termes de santé, formation, précarité résidentielle des anciens enfants placés, nombreuses ruptures dans le parcours de protection facteur de violence institutionnelle, perte d’attractivité de certains métiers.
Les enjeux sont immenses, les départements ont besoin d’un plus grand soutien financier de l’état dans leurs missions sociales mais aussi de services de justice, de santé scolaire, de psychiatrie infantile non sinistrés, responsabilités de l’Etat.
La majorité des acteurs déplore un projet décevant, manquant de souffle, voire une occasion gâchée.
Certes, ce texte comprend des mesures positives, des dispositions actant des avancées mais sans vision d’ensemble, un patchwork législatif en somme et pas une réforme structurante.
Saluons notamment l’ajout de l’Assemblée Nationale conforté par la commission sociale du Sénat de l’’interdiction de l’hébergement en hôtel des mineurs pris en charge par l’ASE, comme le droit au retour à l’ASE du majeur de moins de 21 ans, l’interdiction de réexamen de la situation d’un MNA et aussi l’augmentation et la sécurisation de la rémunération des assistants familiaux
Cependant, en l’absence du renforcement des moyens humains de l’Aide Sociale à l’Enfance, pensons à la carence en éducateurs spécialisés dans beaucoup de départements, sans revalorisation du travail social, beaucoup de dispositions risquent d’être inappliquées comme le sont déjà nombre d’actions éducatives en milieu ouvert et même de placements.
Enfin, le texte comprend des articles relatifs aux MNA dont certains avaient été inclus dans la loi 3DS ; leur place est bien dans un texte sur la protection des enfants mais il convient d’en expurger ce qui a trait aux prérogatives de l’Etat en matière de politique migratoire qui percutent les objectifs attendus d’un texte de loi sur la protection de l’enfance, soit de garantir les droits à la sécurité et à la protection des personnes se déclarant mineurs.
Aussi, nous nous opposons au recours obligatoire au fichier d’Appui à l’Evaluation de la Minorité, perpétuant l’idée d’un nomadisme des mineurs, phénomène qui n’a jamais été sérieusement documenté.
Les bonnes intentions de ce texte restent entachées par ce type de dispositions envers les mineurs étrangers qui ignore la présomption de minorité et le devoir de protection à leur égard.
Ainsi, nous rappelons notre opposition aux sorties sèches suite aux évaluations de majorité le temps du recours auprès du juge pour enfants, aux tests osseux comme à l’enfermement d’enfants en rétention administrative.
Pour permettre aux départements de mettre à l’abri et d’accompagner ces mineurs étrangers isolés, l’Etat doit soutenir les départements et réduire les différences de charge financière.
Comme le déclarait un ancien premier ministre, il ne peut pas y avoir deux types de protection de l’enfance, une pour les enfants français et une pour les enfants étrangers.
Ce que nous devons à tous les enfants, c’est d’assurer la fonction de suppléance parentale qui incombe aux autorités publiques pour chaque enfant placé, en les accompagnant si nécessaire jusqu’à leurs 25 ans, c’est aussi un plan de lutte résolu contre les situations de maltraitance dans les lieux de placement.
Le groupe écologiste Solidarité et Territoires portera de nombreux amendements en ce sens.
Cependant, même amendées, les dispositions positives du texte seront manifestement insuffisantes de l’avis même de la Commission nationale consultative des droits de l’homme qui souligne que « les objectifs poursuivis ne pourront pas être pleinement atteints par cette réforme ».
En conséquence, le groupe écologiste s’est abstenu.